ANR MémoMines
Conversion des traces mémorielles en médiations numériques : le cas de la mémoire minière
Le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais a été exploité pendant près de 300 ans, entre 1720 et le 21 décembre 1990, date de la remontée de la dernière gaillette. En Lorraine, à Creutzwald (Moselle), la dernière mine ferme le 23 avril 2004. En Allemagne, la dernière mine de charbon, basée dans la Ruhr, a fermé en décembre 2018.
Alors que les années 1990 sont marquées par un désintérêt voire par la volonté d’effacer les traces du passé, les années 2000 se caractérisent par une prise de conscience progressive de sauvegarder le patrimoine industriel qui aboutit en 2012 à l’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO de 353 éléments sur 109 sites.
Le projet MémoMines est porté par Sylvie Merviel-Leleu.
Endangered cultural heritage
La problématique générale du projet MémoMines porte sur la conservation de faits ou d’événements constituant des patrimoines culturels souvent proches de la disparition (endangered cultural heritage) : elle traite en particulier de la sauvegarde des mémoires individuelles par leur conversion en traces mémorielles, de leur mise à disposition sous forme de corpus d’archives numériques accessibles à tous, de leur remédiatisation pour des usages sociaux circonscrits, et de leur mise en scène/installation (trans-médiatique) dans le cadre de lieux de mémoire dédiés.
Le projet MémoMines comprend la recherche fondamentale, la conception et la réalisation de dispositifs innovants et leur évaluation en situation écologique d’usage. L’ensemble de la problématique, traitée et analysée dans une perspective interdisciplinaire (sciences de l’information et de la communication, sciences du langage, muséologie, informatique), est appliquée dans le cadre spécifique de la mémoire de la mine.
Consortium universitaire et partenaires institutionnels
MémoMines est un Projet de Recherche Collaboratif. Il associe trois laboratoires universitaires : DeVisu de l’UPHF qui en est le porteur (le Pr Sylvie Leleu-Merviel est le coordinateur du programme), GERiiCO de l’université de Lille-SHS (référent : Pr Stéphane Chaudiron) et le laboratoire PLIDAM de l’INALCO (référent : Pr Peter Stockinger). L’Institut National de l’Audiovisuel (INA) est également partenaire de ce programme. Le projet s’appuie enfin sur un réseau d’expertise constitué de la Mission bassin minier, du Centre historique minier de Lewarde, d’Arenberg Creative Mine et de la CAPH.
Défis du programme ANR MémoMines
Sur le plan scientifique et technique, le projet MémoMines répond aux 5 défis suivants :
- la constitution/production de la mémoire minière sous forme 1) d’un choix raisonné de traces mémorielles à numériser ; 2) de la captation d’entretiens préalablement scénarisés avec d'anciens professionnels de la mine (mineurs, ingénieurs, géomètres, techniciens, personnels de santé...) ; 3) de la restitution du cadre de vie social, de travail et personnel de ces acteurs ;
- l’explicitation de l’univers de connaissance de la mine, la définition et l’élaboration d’un métalangage (d’une ontologie au sens informatique du terme et d’un thesaurus) pour enregistrer les traces mémorielles préalablement captées, pour les analyser (décrire et indexer), pour les publier et diffuser en ligne et, enfin, pour assurer leur pérennité ;
- la réalisation des archives audiovisuelles de la mémoire minière sous forme d’un portail web dont les accès au fonds préalablement collecté et analysé tiennent compte de l’univers de connaissance spécifique au monde de vie des mineurs ;
- la conception et la mise en place de dispositifs techniques innovateurs pour l’exploitation – la remédiatisation – des traces mémorielles numérisées et archivées sous forme de projets cross- ou transmédias à caractère notamment culturel, ludique et pédagogique, sur site en musée et en consultation numérique distante ;
la spécification et la mise en place d’une « plateforme de travail » intégrant les différents outils, procédures et méthodologies pour mener à bien la collecte et l’archivage des traces mémorielles de la mine, leur diffusion via un portail web et leur réutilisation/remédiatisation
Le projet MémoMines répond à un double enjeu :
1/ enjeu scientifique et technique : élaborer une approche structurée pour la constitution, l’appropriation et le partage de patrimoines culturels dans des contextes sociaux variés – approche basée sur :
- un cadre théorique focalisant sur la description de la sémantique, de l’univers de sens d’un patrimoine, de son appropriation et de son partage en situation de médiation culturelle et de valorisation territoriale ;
- une méthodologie de projets de numérisation, de valorisation et d’appropriation de corpus audiovisuels documentant un patrimoine ;
- des ressources métalinguistiques (ontologie de domaine, terminologies spécialisées, standards, ...) pour classer, décrire et éditer/rééditer les corpus audiovisuels ;
- des dispositifs partagés d’archivage, de diffusion, de médiatisation/remédiatisation de corpus audiovisuels documentant un patrimoine.
2/ enjeu expérimental et de terrain : tester et valider cette approche par un travail de terrain concret consacré au patrimoine minier sous forme de corpus indexés et annotés de données et de métadonnées médias en ligne et utilisables en tant que ressources numériques pour des projets de recherche, de valorisation territoriale et de médiation culturelle.